En matière d’ISF, l’article 885 D du CGI dispose :
« L’impôt de solidarité sur la fortune est assis et les bases d’imposition déclarées selon les mêmes règles et sous les mêmes sanctions que les droits de mutation par décès ».
L’article 761 du Code général des impôts prévoit en ce qui concerne la liquidation des droits de mutation à titre gratuit :
« Les immeubles, quelle que soit leur nature, sont estimés d’après leur valeur vénale réelle à la date de la transmission ».
Les textes précédemment cités se réfèrent à la notion de valeur vénale mais ne la définissent pas.
A défaut de définition légale, il convient de rechercher les définitions apportées par la jurisprudence.
La Cour de cassation a posé le principe général selon lequel la valeur vénale est constituée par le prix qui pourrait être obtenu par le jeu de l’offre et de la demande dans un marché réel, compte tenu de l’état dans lequel se trouve l’immeuble (Cass. com. du 23 octobre 1984 : GFA de Plaimpied).
Ainsi, pour apprécier l’état du bien, il y a lieu de tenir compte de ses caractéristiques intrinsèques et des situations de fait et de droit l’affectant au jour du fait générateur de l’impôt (arrêt précité et Cass. com. du 23 octobre 1984 : Cabrol ; Cass. com. du 22 juillet 1986 n° 85/10782 et Cass. com. du 12 novembre 1986 : Jobin).
Pour déterminer la valeur vénale réelle d’un bien, il convient de procéder à des comparaisons tirées de la cession, en nombre suffisant, de biens intrinsèquement similaires en fait et en droit.
Toutefois, le caractère exceptionnel d’un immeuble peut rendre l’évaluation par comparaison impossible.
Dans une première affaire, la Cour d’appel de Versailles (CA Versailles 4 mai 2021 n°19/08883) a jugé que les termes de comparaison opposés par l’administration fiscale n’étaient pas pertinents du fait des différences notables entre les caractéristiques des biens proposés et le bien exceptionnel litigieux.
Ainsi, l’administration fiscale ne démontrait pas la sous-évaluation des valeurs déclarées à l’ISF par les requérants.
Les impositions supplémentaires d’ISF et les pénalités y afférentes ont donc été intégralement déchargées.
En l’espèce, la méthode par comparaison utilisée par l’administration fiscale n’était pas appropriée.
Dans une seconde affaire, en présence d’un bien ayant un caractère exceptionnel, l’administration n’a pas recouru à la méthode par comparaison mais s’est référée au prix fixé dans le mandat de vente donné à l’agent immobilier et au prix de vente effectif du bien immobilier.
Le requérant contestait la méthode retenue par l’administration fiscale.
La Cour d’appel de Paris (CA Paris 5 décembre 2022 n°21/03150) a validé l’évaluation retenue par l’Administration fiscale.
Pour rappel, la Cour de cassation (Cass. com. 30 octobre 1989 n°1226 D, Cass. com. 19 juin 1990 n°868 P) considère qu’une vente ultérieure au fait générateur de l’impôt ne peut aucunement constituer une base légale d’évaluation.
Ce n’est qu’à titre exceptionnel que la Cour déroge à ce principe (Cass. com. 16 avril 2013) lorsqu’il n’existe aucun élément de comparaison antérieur ou concomitant au décès.
Cependant, la Cour d’appel de Montpellier (CA Montpellier 16 septembre 2022 n°17/04953) ainsi que la Cour d’appel de Paris ont jugé qu’une cession postérieure peut être retenue pour déterminer la valeur d’un bien immobilier.
En l’espèce, les requérants avaient déposé une déclaration de succession rectificative modifiant à la baisse l’évaluation de deux biens immobiliers cédés dans les mois suivant le décès pour un prix inférieur à celui initialement déclaré.
Bien que ces valeurs soient postérieures au fait générateur, la Cour a retenu ces montants étant donné la concomitance du décès, des avant-contrats et des cessions.
La présente décision de la Cour d’appel de Montpellier mériterait d’être confirmée par la Cour de cassation.
Au vu de ces jurisprudences, il faut rappeler que chaque évaluation de bien immobilier est complexe, particulière et spécifique.